i nicky il carbure au régime double c. café et clopes. plus il est amer, plus ça lui colle au palais, plus ça lui plaît. en soi, ça joue pas grand-chose sur son organisme, ça l'aide même pas à le réveiller. pourtant ça fait un moment qu'il est dedans, au même titre que la cigarette. petite addiction banalisée, rien ne vaut, selon lui, une matinée tempête junior sur fond de mégots et de tasses tachées par le café. ii il est tatoué, il est percé. de piercings, en plus de l'être des oreilles, il porte un anneau au nez qu'il dissimule lorsqu'on lui demande - pour faire bien, pour éventuellement pas brusquer, pour pas faire sale. quant aux tatouages, il arbore avec fierté et discrétion deux pièces aux fondations proches. l'un représente le squelette d'un cerf et vit à l'intérieur de sa cuisse droite, le second, lui, longe tout le côté de la première phalange de sa main gauche, illustrant la tentacule d'un poulpe - même si nicky, il préfère parler d'un kraken. iii à l'âge de quinze ans, nicky il s'est mis gentiment à dealer. non pas pour la folie de l'adrénaline ou encore l'envie de la jouer thug, seulement pour l'argent facile. il remercie encore les copains qui l'ont fait plonger là-dedans, et si nicky c'était pas un gros consommateur - si ce n'est même un minuscule avec ses pétards - il était à ça de prendre ça comme avenir. puis y'a eu l'arrestation de sage, y'a eu la coupure nette avec ce monde-là. s'il a cru bon de continuer les magouilles quelques mois après, ça a perdu de son intérêt, de sa splendeur. la petite frappe s'est retirée. iv il porte toujours une bague semblable à une chevalière à son pouce droit. sans elle il se sent nu, nicky. elle veut rien dire pourtant, elle a été achetée dans une brocante à un prix ridicule, et il s'étonne même qu'elle ait pas cassé sa pipe depuis. v il fait pas de belles choses avec son corps, c'est pas un danseur ou un musicien dont le talent ferait pleurer le plus passionné. en revanche il dessine nicky, beaucoup. il touche un peu à tout, de l'aquarelle à la gouache, de la mine de plomb au crayon, il est pas difficile. tant qu'on le laisse gribouiller, il est content - et les cadavres de carnets s'entassent sur un meuble de sa chambre. vi nicky il est grand, et il a toujours été, affreusement grand. poussée d'hormones oblige, à quinze ans il arborait presque déjà la taille qu'il a aujourd'hui, visage bien développé il avait rien d'un poupon qui découvrait les joies de la vie adulte. il était, adulte - véritable perche. vii il porte des lunettes parfois, rien de bien mirobolant. c'est juste pour éviter aux yeux de se fatiguer trop vite, pour empêcher qu'il se mette à loucher et qu'il arrive plus à se concentrer. aussi rondes que des hublots, ça a juste la fâcheuse tendance à rendre ses traits encore plus creusés. viii il est lent à la détente nicky. c'est pas qu'il écoute pas, c'est juste qu'y'a un instant de latence, parfois quelques secondes de plus, quelques minutes avant qu'il percute. lui, il a besoin de concret, lui il a besoin qu'on lui dise pour qu'il comprenne - il sait pas lire entre les lignes, alors exit le mélodrama aux portes qui claquent sans raisons, c'est pas lui qui viendra courir sous une pluie battante. ix c'est un grand nostalgique nicky. c'est un grand nostalgique qui aurait aimé connaître un peu plus longtemps les années 90 et il voue donc une grande admiration pour cette période. en matière de jeux vidéos, de films, même du style vestimentaire, dès qu'une connerie du genre lui tape dans l'oeil, il fait saigner la carte bleue sans regrets. x boulimie, éternelle amie adolescente trouvée au coin d'une rue, d'un miroir brisé aux reflets irisés. elle est venue comme ça, du jour au lendemain c'était les doigts enfoncés dans sa bouche à se faire dégueuler. au départ assez millimétré pour pas que ça se capte, ça a fait que s'empirer les années s'écoulant. envoyé dans une clinique jusqu'à ce que son état se stabilise, qu'il reprenne un peu de poids, il y a passé presque six mois. parce que nicky jouait au con, nicky provoquait. ça a chié une bonne partie de la superbe année de ses dix-huit ans. si maintenant il reste timide en matière de nourriture, les couleurs se sont plus éparpillées sur son visage, lui donnant dégaine humaine plus que cadavérique. pour autant parfois ça menace de l'appeler, de le ronger, de le bouffer façon grand méchant loup en bad trip sur le chaperon rouge.