don't trust a ghost

Enfin autre chose que le bruit du vent dans le manège, un bruit de civilisation. Les vrombissements de moteur qui ronronnent à côté d’elle sur la route de Maggie Valley. Elle n’a pas mis les pieds dans le centre de la ville depuis maintenant trois semaines. Elle a jusque-là toujours envoyé quelqu’un, mais cette fois une petite tête brune a franchi ses barrières et l’a fait craqué. Au fond, Yara ne sait pas vraiment de quoi elle a peur. Tous savent qu’elle est de retour, avec une fille, rien n’est si effrayant dans les commérages des rapaces de la ville. Posi, son fidèle ami depuis des années maintenant trottine à ses pieds, faignant l’indifférence face à l’explosion d’amour de la fillette qui l’enlace de ses petits bras tout en marchant. Yara sourit amusée, elle salue des passants tout en gardant un œil maternel sur Rozen qui semble très excitée à l’idée de cette virée citadine. Après le tournant donnant sur la place centrale, elles entrent toute deux dans la petite épiceries du vieux Doclan, sur le tintement d’une sonnette. Les yeux émerveillés par le rayon confiserie de sa fille, font s’accroupir Yara à sa hauteur. – Une seule, alors choisis bien. – La fillette court jusqu’au fond du rayon. Tandis que Rozen est prise dans sa réflexion intense, Yara s’avance vers la caisse. – Bonjour Doclan, tu as ce que mon père t’a commandé ? – Le vieil homme au gilet usé, remet ses lunettes sur le bout de son nez laissant à Yara tout le loisir de se souvenir à quel point enfant elle trouvait qu’il ressemblait au père noël. – Ah Yara ! Cela fait un moment que je ne t’avais pas vu ! Ne me dis pas que tu te terres comme ton vieux père aigri dans votre vieux domaine ! Une beauté comme toi ! Quel gâchis ! – Un rire, si rare et inattendu de la belle blessée et meurtrie tinte dans la boutique. – Voyons Doclan, Margareth ne serait pas heureuse d’apprendre que vous me faite du charme ! – Le vieux pour simple réponse hausse les épaules avec un grand sourire, alors qu’il se redresse de sa chaise et part vers l’arrière-boutique, laissant Yara et Rozen seules… ou presque.

Un mois. Un petit mois qu'il était de retour et il avait déjà marre. Il ne pouvait simplement que s'en prendre à lui-même. Il n'aurait pas dû sombrer dans l'alcool, mais c'était de sa faute à elle. A cette femme qui hantait encore ses pensées. Yara Glanmor. Son ex et sulfureuse coéquipière chez les profiler. Tout avait basculé d'un coup et il n'avait rien compris. Il avait atteint le fond. Ronchon comme tous les matins, il se leva du pied gauche. Rien dans le réfrigérateur. Il attrapa ses clefs et fonça avec sa voiture de police jusqu'au centre-ville. Il avait été renvoyer et il était devenu ce simple policier dans cette ville qui l'a vu pour la première fois et dont il ne voulait plus envie de connaitre. Il était coincé maintenant pour le reste de ses jours ici. Triste existence. Après s'être royalement mal garé, il entra dans l'épicerie qu'il connaissait aujourd'hui par coeur. Il en avait fait avec ses amis d'enfance des bêtises entre les rayons. Le propriétaire se souvenait bien de lui, mais il avait passé outre ses conneries de l'époque ou presque. Il avança dans les rayons, piocha et se dirigea près de la caisse. Il aurait pu reconnaître la silhouette qu'il avait devant lui dans une botte de foin.  Sa chevelure corbeaux, ses courbes qu'il avait dangereusement caresser la nuit où leur relation avait changé. Les images brûlantes lui revinrent à l'esprit et les mots de leur conversation, de leurs confidences s'entrechoquèrent dans sa tête. Il avait aussi cette colère. Elle l'avait ignoré, elle avait même hurler pour ne plus le revoir. Elle avait gâcher sa vie comme elle l'avait rendu merveilleuse. Saleté de sentiments à la con. Les femmes et leur venin. Il s'approcha de la caisse. Il se fit plus grand pour la regarder de haut. Jeu de gamin, mais cela avait été toujours comme ça entre eux. Il pouffa de rire, un petit sourire au coin venu s'ajouter par après. Il regarda à côté. Il y avait une gamine. Elle lui ressemblait. Evidemment, elle avait refait sa vie alors que lui était reparti de zéro. Il avait la rage, mais cela ne se voyait pas sur son visage. - Comme on se retrouve Glanmor. - S'exclama-t-il de sa voix grave et sensuel qui en avait fait tomber plus d'une. Il aurait dû se douter qu'elle était de retour chez elle, là où son père avait construit un haras. Toutes ses recherches pour revenir à l'unique endroit qu'il n'avait même pas pensé alors que c'était évident. Espèce d'imbécile!

- Comme on se retrouve Glanmor. – Jusque-là elle observe sa fille du coin de l’œil. Appuyée légèrement contre le comptoir elle se fait surprendre par cette voix. Une voix d’un passé si lointain. Un timbre de voix sensuel, séducteur, légèrement enroué par l’âge, la maturité qu’elle ne pensait jamais plus entendre. Elle se retourne et fait face à un être d’un passé qu’elle voulait révolu, enterré mort. Un sourire narquois, ce même sourire d’autrefois, d’avant tout. Puis elle plonge son regard chocolaté dans l’océan orageux de son interlocuteur. Yara en a longtemps étudié les nuances, il y a bien trop longtemps, elle le trouve un peu éteint, peut être simplement du avec les années qui passent, ou peut-être qu’elle divague juste, prise au piège dans cette prison qu’elle a fui après y avoir été retenu une nuit de secrets et de mensonges. – Hamilton… - Sa voix est éteinte, ce prénom lui arrache les entrailles, réouvre des cicatrices qui auraient juste dû rester fermées à jamais. Elle fuit son regard Yara, posant inquiète son regard sur la fillette qui ne cesse de prendre un paquet de bonbons avant de le reposer pour un autre. L’insouciance de l’enfant est envieuse pour cette mère mise face à face à une réalité qu’elle refusait de voir opérer. Yara fait volteface pour observer le vieil homme dans l’arrière-boutique, comme si par des cris de SOS silencieux elle pourrait juste partir, mais le propriétaire ne semble pas vouloir revenir. Yara se redresse et détourne son regard de Basile, comme si elle espère qu’en l’ignorant il passe son chemin. Pourtant, elle le connait, elle l’a connu autrefois, elle sait bien qu’il ne laissera pas une occasion de la rendre minable, cette femme qui a cru qu’elle était sienne pour plus d’une nuit. Idiot, stupide qu’elle était, maintenant elle se devait de protéger ce qui lui rester, ce qui lui était cher et qui est le résultat d’une nuit d’illusions, comme empêcher que ce mirage disparaisse sous ses yeux.

Son regard. Qu'est-ce qu'il avait attendu ce moment où il recroiserait un jour ce regard. Ce chocolat fondant, ses perles marrons avec en son centre un trou noir. Il se souvenait de tout ses traits qu'il avait redessiner du bout des doigts. Il avait réussi à la retrouver, à la coincer à nouveau. Le destin avait décidé de les réunir pour le meilleur, mais aussi et certainement pour le pire. Elle susurra son nom. Il était d'ailleurs triste de ne pas entendre ce surnom qui le mettait dans tous ses états, qui le rendait aigri et qu'elle aimait hurler derrière lui. Elle fuyait tout d'un coup la situation comme elle l'avait fait auparavant. Elle essaya de s'échapper, mais il n'allait pas la laisser filer cette fois-ci. Il voyait bien son petit jeu. Elle l'ignorait, Hamilton n'aimait pas être ignorer et encore plus par la femme pour qui il ressentait ses sentiments prisonniers dans cette cage de glace qu'est son coeur. Elle jeta plusieurs coup d’œil à cet enfant qui était sans doute le fruit d'une nouvelle liaison. Elle avait refait sa vie la vipère.  - Tu as perdu ta langue.. C'est bizarre, tu ne m'as pas encore frapper et hurler à la figure de m'en aller. J'attendais un meilleur accueil de ta part. - Il la nargua de son sourire presque victorieux de la rendre mal à l'aise. Il était fière de se venger de son ex coéquipière qui l'avait traité comme un moins que rien et qui l'avait rendu ainsi. Hamilton le raté, Hamilton l'alcoolique. - C'est ta fille? J'espère qu'elle n'a pas le caractère de sa mère. Le père doit souffrir à la maison.  - Si il savait, si il savait que la gamine avait ses gênes, il serait sur le cul. Il ne se rendait pas compte des mots qu'il balançait, il ne se rendait pas compte des coup de poignard qu'il donnait. Un homme sans coeur, un homme avec l'âme meurtri, il était.